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La poésie zibalbe se compose essentiellement de fragments, les poètes étant souvent interrompus par l’arrivée d’un papillon (rappelons que tout Zibalbe digne de ce nom entre dans un état d’immobilité totale lorsque survient un papillon).
Le taureau et le lézard
Maître taureau dans son panier d’osier
Tenait en sa bouche une étoile
Maitre lézard par l’éclat attiré
S’accrocha soudain à la voile
Danse avec le vent
Gwenaël danse avec la pluie
Julie danse avec un orage
Aywen danse avec les arbres
Maïssane danse avec le vent
Nathan danse avec le soleil
Le facteur chauve
C’est un coin de nature où nage une vipère
Injectant fortement son venin aux souris
De bronze ; où le sommeil de la lune prospère
Fuit : une petite flaque où poussent des radis
Un facteur chauve, les oreilles décollées,
Sacoche pleine à craquer de poissons géants,
Nage ; il est allongé sous la terre creusée,
Planant dans l’univers du grand saumon puant
Les orteils dans la boue, il nage comme un crabe.
Sur la route il s’amuse à compter les syllabes :
Verdure, calme-le gentiment : il a bu.
Les couleurs ne font pas fermenter ses tympans
Il nage dans son sommeil en rêvant d’un paon
Joyeux. Il prend son envol vers le ciel pointu.
L’un des productions emblématiques de Zibalbul étant la colle de poisson, rien d’étonnant à ce que les poètes en fassent un large usage.
Le caviardage, qui consiste à noircir une partie d’un texte, est une activité poétique florissante à Zibalbul, car ce pays est l’un des premiers producteurs mondiaux d’encre de seiche.
Devant moi
Fasse beauté que je marche
Tout autour de moi
*
La vie ?
Une luciole en hiver
Au coucher du soleil
*
Partez, partez,
Personne n’a vu
L’avenir
*
Me voici marin bouillant,
Sombre furieux, brutal,
Sauvé
*
Mais les cœurs s’écartent toujours
Allons ! Les désirs rêvent
De vastes voluptés
*
On éprouve surtout
L’odeur avec soi
Toujours plus tard
*
Quand on veut
On peut
Aller
*
J’ai les étoiles
Infini de la nature
Suprême
*
Je rends chaque parole
Inouïe
Grâce au souffle
*
On songe
à bien
vivre
*
Mettez le feu
Il faut compter
Cette semence
*
La nature n’a rien
Qui soit en dehors
D’elle
*
Odieuse
Science
Du respect
*
L’océan du combat,
Pendant le rameau,
Tire un secret vigoureux
*
Il
Tombe
À l’arbre
*
L’homme en arrive à ce mur
En contact direct avec
Le troupeau où l’on mène son existence
*
Le pouvoir
Proclamé
Avec élégance
*
Tu te lèves pour la lumière
Et ta force remercie de vivre
Tu ne vois pas la faute
*
Orages d’une autre chevelure
Le démon de la nuit sillonne
Les vagues
À la médiathèque de Bailleul, nous avons inventé des concepts en mélangeant des noms et des adjectifs glanés dans les livres qui nous tombaient sous la main.
L’archéoptéryx électrique est un oiseau qui se défend en lançant une décharge électrique.
La dent ultraviolette appartient à un poisson carnivore. Elle émet une vive lumière qui attire ses proies.
Le rouge-gorge musclé est un oiseau qui se nourrit de pastèques et de potirons, et qui est capable de les porter sur une courte distance.
Le mirage fossile est un phénomène très rare : il s’agit de la trace d’une illusion.
La neige végétale est une plante dont les graines blanches évoquent des flocons de neige.
La perspective glaciaire désigne l’attente craintive d’une période de glaciation qui doit survenir dans quelques siècles.
Le prédateur gonflé est un animal d’une nature encore mal connue qui peut se gonfler d’air et se laisser rouler jusqu’en bas d’une pente.
Pour forger d’autres concepts intéressants – ou tout simplement des poèmes – il suffit de tirer au sort un élément de la première colonne et de le marier avec un élément de la seconde (en accordant le genre si besoin) :
rosée | abracadabrante |
neige | complexe |
aurore | fausse |
ouragan | retourné |
ciel | réaliste |
illusion | radioactive |
optique | toxique |
mirage | combustible |
magicien | inépuisable |
perspective | fossile |
poteau | léger |
forteresse | puissante |
tente | immobile |
village | aérien |
branchage | gonflé |
dent | électrique |
océan | coloré |
laideur | articulée |
poisson | musclé |
prédateur | menaçant |
maison | impressionnante |
chaleur | ultraviolette |
feu | violent |
bois | doux |
électricité | glaciaire |
Les enfants de l’école Jules Ferry ont imaginé une berceuse traditionnelle dans laquelle on retrouve un élément central de l’imaginaire zibalbe : le vent.
Le vent te dérange
Ne t’inquiète pas
Fais dodo mon ange
Ta maman est làTes cheveux s’envolent
Pleure mon bébé
Les oreilles décollent
Dansent les palmiersLe vent met du sable
Dans tes longs cheveux
Flotte un dirigeable
Dans le grand ciel bleu
Ce poème se lit dans le désordre, chaque vers étant noté sur une petite fiche.
Le bateau se promène à cause du vent
Je suis dans le noir à cause du vent
Une fille s’endort à cause du vent
Quelqu’un vient à cause du vent
Les algues se décrochent à cause du vent
Je suis toute seule à cause du vent
Le bateau vole à cause du vent
Les livres perdent leurs pages à cause du vent
Un fantôme rentre chez moi à cause du vent
Je suis amoureuse à cause du vent
Le bateau fait naufrage à cause du vent
On trouve une cachette à cause du vent
Les poissons volent à cause du vent